Carlos Vaquera:
« Il faut garder le plaisir de l’émerveillement! »
Carlos Vaquera est un magicien, illusionniste et mentaliste hors pair, bien connu du public. Il a remporté différents premiers prix internationaux à Las Vegas, Nashville, Londres, Bruxelles, etc. En 1994, il devint présentateur à la RTBF avec son talk-show « Carlos et les autres », suivi en 1995 de « La Bande à Carlos », pour accéder au prime-time avec l’émission « Pour la Gloire». Aujourd’hui, il revient sur le devant de la scène avec un spectacle fort et puissant : « Rien ».
Vous arrivez à Bruxelles à l’âge d’un an, car votre père décide de fuir le régime franquiste. Vous vous installez tout d’abord Forest, puis à Woluwe-Saint-Lambert où vous y faites vos humanités.
C’est tout à fait exact ! Je ne me souviens plus de Forest, j’étais trop petit, mais je me souviens qu’à Woluwe-Saint-Lambert nous étions coupés de la population espagnole. J’étais très sportif et je le suis toujours, c’est la raison pour laquelle je me suis naturellement dirigé vers des humanités où le sport était mis en avant. J’ai commencé les arts martiaux à l’âge de 13 ans. Dans ma tête, ma voie était là dedans jusqu’à ce que je découvre la magie…
Comment la magie est arrivée dans votre vie ?
En humanités, j’avais un copain qui avait un ami dont le frère était magicien. Un jour, je vais chez lui pour voir ce qu’il fait et c’est à ce moment-là que j’ai eu la révélation. Je me souviens que c’était l’époque des grandes vacances et je me suis procuré le livre « Great Magic ». Une véritable perle en la matière parue dans les années 50. J’ai travaillé la magie, comme un fou, pendant tout l’été et je suis retourné chez le frère de mon ami pour lui montrer ce que j’avais appris. Il a décidé de m’emmener au Greenwich qui était une brasserie où les magiciens pouvaient faire découvrir des tours au public. J’y suis resté 6h à regarder tous les tours. J’étais littéralement mordu ! J’y suis retourné la semaine d’après et puis encore après…même s’ils n’expliquaient rien, à force de les voir travailler, je comprenais des choses. Et c’est là que j’ai décidé d’en faire mon métier.
À 21 ans, vous devenez le premier professionnel à vivre exclusivement de la magie de proximité en Belgique.
Tout le monde n’arrêtait pas de me dire que personne n’arriverait à vivre de la magie de proximité en Belgique et je l’ai fait. C’est bien la preuve qu’il ne faut jamais écouter les autres. Quand on a un trésor intérieur, il faut tout faire pour le réaliser et suivre sa voie au-delà des opinions des autres… quitte à se casser la figure, au moins on aura essayé ! Beaucoup de gens passent à côté de leur trésor intérieur par peur. J’aime les défis et les challenges. Je n’hésite jamais à me lancer et si j’échoue, je sais que j’apprendrai toujours quelque chose. Derrière chaque peur se cache un désir. Par exemple, quand quelqu’un dit à son conjoint : « j’ai peur de te perdre », cela sous-entend : « j’ai envie de faire ma vie avec toi ». Il faut voir la peur comme un moteur et non un frein.
En parallèle à la magie, vous êtes comédien et votre premier spectacle, se joue, à l’époque au Rideau de Bruxelles.
Oui, quasiment au même instant ! Je rencontre Martine Gilbert qui travaillait sur une pièce d’un auteur belge inconnu du grand public qui s’appelle Ernst Moerman dont les oeuvres me touchent au plus haut point. Le metteur en scène de la pièce Bernard De Coster cherchait un comédien qui puisse faire de la magie. Il n’a jamais trouvé, mais il a trouvé un magicien qui savait jouer la comédie (rire). Dans ce milieu artistique, on apprend tous les jours, rien qu’en côtoyant les gens du métier. C’était une expérience très enrichissante.
Avez-vous dû un moment vous battre pour emprunter le chemin de vie qui est le vôtre aujourd’hui ? Avez-vous dû lutter contre l’opinion des gens ?
Je dois avouer que je suis un indépendant. J’étais plus souvent à trainer dans la rue qu’à rester enfermé chez moi. J’ai donc eu des leçons de vie en fréquentant des belles et des moins belles personnes. J’ai toujours écouté ma petite voix intérieure. Sans regrets jusqu’à présent, même s’il y a eu des erreurs parfois. Pour moi, la vie c’est acquérir un maximum de connaissances, d’émotions en faisant le moins de mal possible aux autres même si quand on fait un choix, on fait toujours du mal à quelqu’un même involontairement. Je suis très heureux de ce que la vie m’a offert et de ce qu’elle m’offre tous les jours…avec son lot parfois d’injustice ou de tristesse. La vie nous offre des leçons pour qu’on apprenne quelque chose.
Comment vous êtes-vous dirigé de la magie de proximité au mentalisme ?
L’émotion magique la plus intense, pour moi, est quand les spectateurs n’ont aucune idée de la manière dont les magiciens ont réalisé leurs effets. À partir du moment où le spectateur a une idée, même s’il est à 1000 km de la vérité, il n’y a plus d’atmosphère magique. C’est donc très compliqué de créer cette atmosphère. Dans le mentalisme, j’ai l’impression que c’est plus simple à créer, mais plus difficile à présenter. Avec les cartes, on fait un tour et les gens se diront qu’il y a eu une manipulation qu’ils n’ont pas vue. Dans le mentalisme quand je commence à dévoiler des informations sur des personnes que je ne connais pas, comme je fais durant mon spectacle RIEN, les gens sont stupéfaits. Certains pensent même que j’ai des pouvoirs. Quand on parle de mentalisme, on se rend compte que c’est de l’illusionnisme à 80% et puis il y a des techniques d’influence, de la manipulation, des inductions verbales et non verbales….mais tu ne peux pas faire que ça ! Dans mon spectacle RIEN, je transmets pas mal de choses notamment le fait de vider son esprit. Vider son esprit, c’est la chose la plus importante. Le problème c’est que nous avons tous des idées préconçues, des préjugés … car nous avons été élevés, formatés … Je dis toujours que plus nous vieillissons, plus nos oeillères se referment. Notre seul devoir dans la vie, c’est d’ouvrir ses oeillères. Garder le plaisir de l’émerveillement, regarder les choses comme si on les voyait pour la première fois. Découvrir les gens comme si c’était la première fois.
Dans votre vie, il y a la magie, le mentalisme, les spectacles, l’écriture, le sport, les conférences, … Que faites-vous quand vous sentez un moment que vous êtes surchargé ?
Je ne sens jamais qu’il y a trop ! Depuis plusieurs années, je me suis auto-discipliné et j’ai une méthode de travail qui est bien spécifique. J’ai 7 compartiments de travail différents. Quand je travaille, je me chronomètre. Cela me permet de mieux gérer mon temps. J’aspire à faire du karaté 4 heures par jour car nous devons prendre soin de notre corps. C’est un outil merveilleux ! Après je crois que quand on a trouvé son trésor intérieur et qu’on est passionné, on vieillit moins vite que les autres. Aujourd’hui, je suis encore plus passionné qu’avant. C’est un chemin qui n’a pas de fin. C’est comme apprendre à connaitre une personne, c’est sans fin. Nous limitons souvent les personnes à ce qu’elles semblent être mais c’est loin d’être la vérité.
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Photos : @Christophe Vanderborght
Remerciement au Train hostel pour leur accueil