Christophe Mercier :
« On a vraiment besoin de se lier à la nature et aux autres »

Christophe-Mercier

Rencontrer Christophe Mercier, c’est vous assurer que vous allez passer un bon moment : intéressant, drôle…sa vie est remplie d’anecdotes et d’histoires. Le genre de personne avec laquelle on pourrait discuter longtemps en ne voyant pas le temps passer… Christophe Mercier, fils du célèbre journaliste et écrivain, Jacques Mercier, est architecte et musicien. Il vient de sortir un livre avec son père : « Paysages Citoyens à Bruxelles« . Rencontre avec cet homme passionné, passionnant qui enchaîne les projets avec engouement ! 

Fils du célèbre Jacques Mercier, vous étiez trois enfants Sophie et Stéphane Mercier, quels souvenirs gardez-vous de votre enfance ? 

C’était une enfance heureuse. Nous vivions à Braine-l’Alleud, chaussée d’Alsemberg…C’était marrant, car c’était la campagne, il y a avait encore une ferme à deux rues de là.  On allait chercher du lait ! Il y avait un petit cinéma de quartier et on allait à l’école à pied. Par contre, je n’aimais pas du tout l’école. J’étais en primaires à l’école Saint-Jacques. C’était vraiment la vieille école catholique où les professeurs lançaient la prière à la cantine…c’était une école qui n’avait pas changé depuis les années 50, je crois (rire) ! À la maison, on avait un grand jardin donc nous étions souvent dehors…Cela explique pourquoi je continue d’être attiré par la nature (rire) ! Les haies des jardins étaient basses donc on pouvait discuter avec les voisins facilement ! 

Christophe-Mercier

Comment est venue l’architecture ? 

Christophe-MercierTrès tard, à la base je voulais devenir dessinateur de BD…et puis je ne sais pas pour quelle raison, un jour, j’ai décidé que j’allais devenir architecte sans vraiment savoir ce que c’était. J’étais bon à l’école et je pense que quand tu es bon en maths et en dessin, tu penses à ça sans avoir une réelle image de ce que ça peut être. Puis, l’idée est passée…Et fin de mes humanités, je ne savais vraiment pas quoi faire et mes professeurs m’ont poussé vers polytechniques. Et ç’a été la pire année de ma vie, je crois (rire) ! Je me sentais totalement en décalage avec les gens de ma classe, j’avais très peu de potes. Nous sommes en 1986 et la Belgique jouait le match de foot contre l’URSS que je regarde évidemment jusque 3h du matin et puis je vais fêter ça sur la Grand-Place jusque très tard… et le lendemain, j’avais un examen d’analytique…où je récolte un magistral 5/20. Ma mère vient me chercher après l’examen et je suis un peu dépité. Ma mère me regarde et elle me dit : « En fait, tu n’as pas envie de devenir ingénieur. Tu veux devenir architecte ! » et je dis « Oui, c’est ça que je veux ! »…Je me souviens comme j’étais heureux que ma mère me dise ça…C’était un réel soulagement ! 

Et où avez-vous fait architecture ?

Christophe-MercierÀ Saint-Luc…Arrivé là, c’était comme si j’arrivais à la maison. Ce n’était pas croyable ! Le premier cours, j’arrive en classe et il n’y avait pas de place et spontanément un mec m’a dit : « Viens t’assoir ici, je me pousse » et on a suivi le cours sur une seule chaise à deux. C’est devenu un très bon ami. À midi, on s’est retrouvé à 15 à manger ! Il y avait vraiment une ambiance incroyable en archi. Une véritable entraide ! Il y avait de tout, c’était très mélangé, mais très tolérant… J’ai adoré ! Puis, il y a eu mes stages… Une belle période dans ma vie. Tu te retrouves chez tes parents avec un revenu (rire) ! Ma mère était décédée et mon père s’était remarié. Nous vivions à Hal dans une belle maison en famille recomposée. Nous nous entendons tous très bien comme de véritables frères et soeurs de sang…nous partons en vacances encore ensemble… Nous sommes 5 frères et soeurs au total avec les enfants, ça fait un grand groupe (rire). 

Puis, vous partez au Nicaragua…

Oui, j’avais décidé de faire deux ans là-bas à travailler dans un bureau d’architecture. Mais le projet a très vite tourné à la catastrophe. Le patron est parti avec les fonds et je me suis retrouvé à devoir gérer tout, tout seul. Ce n’était pas évident de se retrouver dans une culture différente à devoir travailler alors que la situation n’est pas claire, que tu ne connais rien et que tu te retrouves à diriger toutes les opérations..

Au bout de deux ans, vous revenez…

Christophe-MercierOui et là je commence à travailler pour la commune de Saint-Gilles, comme indépendant. Et puis, un copain m’a demandé de réaliser une extension à sa maison. Ce que j’ai fait…Puis les projets se sont accumulés…Du bouche-à-oreille, c’était un peu miraculeux (rire) ! La famille et mes amis y sont aussi pour quelque chose…il n’y a rien à faire, c’est génial d’avoir du soutien de ses proches. Puis en 2004, je m’associe avec Murielle Dasnoy suite à un gros projet qui arrive. Nous avons commencé à pratiquer l’urbanisme. En parallèle à ça, je m’étais engagé dans un collectif qui s’appelait « DISTURB » dont l’objectif était de mettre en place des concours d’architecture à Bruxelles, il y avait très peu de connaissances également sur le patrimoine des années 50… On avait détruit beaucoup de choses comme la tour Martini. On s’est donc mobilisé et on a gagné pas mal de choses avec ce collectif : comme des concours d’architecture, la participation citoyenne …. Il y avait vraiment une sous-culture pour l’espace public et pour l’architecture à ce moment-là. Aujourd’hui, tout ça a fort changé…C’était un activisme très concret. On ne disait pas : « On ne veut pas ça », on disait « on ne veut pas de ça, mais on propose ça ». C’était une très belle période ! Ce collectif a arrêté au bout d’une dizaine d’années…car les choses avaient changé. 

Aujourd’hui, vous publiez un livre avec votre père, Jacques Mercier, qui s’intitule : « Paysages citoyens à Bruxelles » …. 

Christophe-MercierMon père avait fait un livre avec quasi tous ses enfants sauf avec moi. Donc, il a voulu remédier à ça (rire) ! Il a d’abord fait un livre avec Claire, sa belle-fille. Elle est super douée en aquarelle, donc ils ont réalisé deux livres pour les enfants, super beaux. Après ça, il a créé la boîte de Jazz avec mon frère, Stéphane Mercier, qui est saxophoniste. L’année dernière, il a réalisé un livre sur le couple avec ma soeur, Sophie, car elle est psychologue de couples. Je pense que c’est une façon à lui d’être proche de ses enfants au travers de leur passion et de la sienne. Il a du temps, il nous fait profiter de ses réseaux et de sa notoriété pour nous pousser. C’est vraiment génial ! Quand il est venu me trouver, je n’avais vraiment aucune idée de ce qu’on pouvait faire. J’ai pensé aux espaces verts… Puis comme souvent dans la vie, les choses sont arrivées par hasard… Il faut se laisser porter par la vie parfois et quand on sent que ça résonne en nous, il faut foncer ! On mangeait avec mon père et Serge Kempeneer, Directeur de la Division Espaces Verts chez Bruxelles Environnement et il nous a suggéré les espaces citoyens. Ça m’intéressait depuis longtemps…j’avais cette fibre-là… Du coup, ce livre que je sentais à moitié, a pris sens. 

Comment avez-vous procédé ?

J’ai répertorié les endroits. Mon père m’a laissé faire ma sélection et on a rédigé à deux. Il a pu poser un cadre et m’aider à le réaliser…je sentais sa touche…Lui, un peu plus historique, et moi, un peu plus dans l’action…Nous sommes très complémentaires. Puis, il y a la promotion…car ça ne sert à rien de faire un livre et de rester dans son coin sans en parler. C’est quand même une réflexion sur la question de vivre ensemble. Pourquoi tout d’un coup, il y a des espaces communs qui grandissent un peu partout dans la ville ? Je pense qu’on a vraiment besoin de se lier à la nature et aux autres. La ville est tellement montrée comme quelque chose de négatif alors que non… La ville est quelque chose de joyeux ! Il y a des choses à faire, il y a des endroits où on se rencontre. La campagne est à la ville et la ville est à la campagne. 

Tu as également un groupe le Krewe du Belge

Christophe-MercierOui, c’est mon dernier groupe ! Mes parents étaient tous les deux des pianistes. Donc, nous avons été poussés très jeunes à faire de la musique. Autant mon frère a tout de suite accroché, autant moi il faudra attendre mes 15 ans pour qu’on me file une guitare et que je commence un groupe. On a joué durant des années ! Je joue de la guitare et du trombone… le trombone, c’est vraiment tout récent ! Je suis allé à la nouvelle Orléans et ce fut un énorme choc pour moi. Un peu comme le Brésil l’avait été des années auparavant. Avec ma compagne, nous sommes partis là-bas lors du Carnaval et c’était incroyable. En revenant, nous avons créé une ASBL le Krewe du Belge dont l’idée est de ramener la musique de la nouvelle Orléans à Bruxelles ! Il y a un grand concert début février à la Tentation, on est super excités !

Plus d’info ? 

www.suede36.be

Krewe du Belge : Facebook 

Livre : « Paysages Citoyens à Bruxelles »

 

Photo illustrant l’article : @Christophe Vanderborght