« Once upon a time in Hollywood » de Quentin Tarantino
Avec le très attendu « Once upon a time in Hollywood », Quentin Tarantino nous plonge dans le Los Angeles de 1969. Devant sa caméra, un duo rêvé : Lenardo DiCaprio et Brad Pitt. Pourtant, jamais l’accueil critique d’un des films du sale gosse d’Hollywood n’a été aussi partagé. « Jubilatoire » pour certains, « dégueulasse » pour d’autres, BIY fait la synthèse et vous confie son avis sur la question!
Depuis l’éclatant « Reservoir Dogs » en 1992, les films de Quentin Tarantino sont devenus synonymes d’un cinéma pop bourré de références et touchant à tous les genres du 7ème art. On court les voir avec excitation, avides de recevoir sa dose d’adrénaline pure et de cool attitude, curieux de découvrir comment le cinéaste va cette fois-ci tordre les codes du cinéma et les transcender. Pourtant les fans du cinéaste risquent d’être quelque peu surpris devant « Once upon a time in Hollywood ».
Résumé :
Rick Dalton (Leonardo DiCaprio), star déclinante d’une série télévisée de western, et Cliff Booth (Brad Pitt), sa doublure de toujours, assistent à la métamorphose artistique d’un Hollywood qu’ils ne reconnaissent plus du tout en essayant de relancer leurs carrières. De plus, en plein été, le 9 août, Hollywood sera à jamais marqué par un fait divers barbare : l’assassinat de l’actrice Sharon Tate, enceinte de 8 mois, épouse du cinéaste franco-polonais Roman Polanski et voisine de Rick Dalton, ainsi que de ses amis dans sa villa, par les disciples du gourou Charles Manson.
Notre avis :
Disons-le tout de go, « Once upon a time in Hollywood » ne joue pas dans la même catégorie que « Kill Bill« , « Inglorious Bastards » ou encore « Django Enchained ». Il semble même en contradiction totale avec son marketing et l’image ludique, cool et méta propre jusqu’ici à la filmographie de son auteur. Et pourtant, le fait que Tarantino soit un cinéphile érudit et que ses films soient (parfois trop?) référencés est un fait que personne ne pourrait contredire. Le projet de le voir consacrer son 9e film au petit monde d’Hollywood promettait une œuvre bourrée d’anecdotes et de références croustillantes, un spectacle décoiffant et exaltant.
Rien de tout cela ne vous attend dans ce film.
C’est un Tarantino plus sombre, plus mature que nous découvrons. Sa vision du Hollywood de 1969 est empreinte de gravité et de mélancolie. Usant d’une retenue non coutumière, le réalisateur reste en arrière-plan. Un peu comme si pour la première fois de sa carrière il ne se regardait pas filmer.
À travers un récit éclaté, le cinéaste cherche avant tout à nous plonger de façon immersive au cœur de l’ambiance d’une époque. Une période de choc entre deux mondes distincts : l’ancien, classique, passéiste et patriarcal et le nouveau, jeune, utopiste et libertaire. Tarantino ne tranche pas. Pour une fois, il se contente d’observer.
Mais revenons-en au récit et aux acteurs. Leonardo DiCaprio campe brillamment un acteur vedette sur le déclin. Son personnage de Rick Dalton est tour à tour parfaitement antipathique, profondément émouvant et totalement pathétique. L’acteur montre une nouvelle fois l’étendue de son talent et sa grande capacité à apporter une réelle humanité et complexité à son interprétation. Il est tout bonnement bluffant.
Brad Pitt, de son côté, nous offre un personnage de Cliff Booth plus en retenue, mais non sans moins de subtilité que son partenaire. Il incarne une force tranquille, tourmentée par ses démons intérieurs. Sa prestation est remarquable. En voyant ces deux-là, on ne peut que penser à un autre grand couple mythique : Robert Redford et Paul Newman.
Margot Robbie, quant à elle, illumine le film de sa grâce et sa beauté. Sa Sharon Tate nous séduit par sa naïveté et son innocence. Son issue fatale (que nous anticipons) rend sa présence extrêmement déstabilisante.
Certains critiques émettent des reproches (allant jusqu’à traiter le film de « dégueulasse ») sur la longue scène où Margot Robbie interprétant donc Sharon Tate, voit au cinéma un film dans lequel Sharon Tate jouait. Tarantino la montre se pâmant devant son interprétation et s’amusant des réactions enjouées des spectateurs autour d’elle. Pourtant, cette merveilleuse scène miroir où Sharon Tate regarde la vraie Sharon Tate symbolise parfaitement la fin de l’innocence et nous plonge dans une profonde et triste mélancolie.
Sans spoiler le final qui lui aussi fait s’élever pas mal de boucliers et engendre de houleux débats, on en ressort avec le sentiment que l’une des volontés majeures du cinéaste avec ce film est d’interroger le rapport entre la fiction et la réalité, entre le cinéma et la vie, le rêve et le fantasme.
Les autres remarques cinglantes accusant Tarantino de misogynie, de racisme et de violence sont totalement injustifiées. Et concernant la violence, le film est d’ailleurs certainement le plus soft de son auteur. Quant aux reproches concernant le traitement réservé à Bruce Lee, ma foi, il faut juste y voir un pastiche humoristique assez inoffensif.
Avec « Once upon a time in Hollywood », Quentin Tarantino nous livre ainsi son film le plus profond. Un beau film sur l’amitié, les rêves déchus et un Hollywood qui n’existe plus…ou qui n’a jamais existé!